Réflexions sur l’efficacité des garanties dans les procédures collectives, Dossier JSS Mars 2012

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Réflexions sur l’efficacité des garanties dans les procédures collectives, Dossier sous la direction scientifique du Professeur Pierre-Grégoire Marly, Journal des Sociétés, Mars 2012

Avant-propos :

« Initialement porté vers la confrontation du droit des sûretés au droit des entreprises en difficulté, le présent dossier s’est finalement émancipé de cette thématique à deux égards : d’une part, en dépassant le strict domaine des sûretés de droit commun pour aborder le privilège de conciliation et la cession Dailly à titre de garantie ; d’autre part, en saisissant le sort des créanciers garantis sous l’angle particulier de la déclaration des créances et du principe d’irresponsabilité du « fournisseur de concours ».

Ce principe d’irresponsabilité, proclamé à l’article L. 650-1 du code de commerce, est l’objet d’une première étude qui livre une analyse critique de cette disposition au moment même où la Cour de cassation vient de se prononcer sur son interprétation[1]. Par une réflexion particulièrement éclairée, Maître Hervé Kensicher démontre l’imprécision du texte précité, tant sur l’étendue du principe qu’il énonce que sur le contenu des exceptions qu’il assigne, spécialement celle tirée des garanties disproportionnées. Six années après son introduction par la réforme de 2005, l’article L. 650-1 demeure ainsi mystérieux, voire obscure. Il se confirme toutefois que la protection qu’il devait primitivement offrir au fournisseur de crédit est manifestement démentie en pratique.

De son côté, notre collègue David Robine livre une utile et subtile réflexion relative à l’incidence du défaut de déclaration des créances sur le sort des garanties dont jouit le créancier. Dans un souci d’exhaustivité, il aborde l’ensemble des garanties consenties tant par le débiteur que par un tiers. Partant, il révèle qu’en substituant l’inopposabilité à l’extinction des créances non déclarées, la réforme de 2005 n’aboutit pas moins à la neutralisation des garanties octroyées par le débiteur, sous quelques réserves toutefois discutables. En revanche, il observe que le nouveau régime du défaut de déclaration favorise nettement le sort du créancier bénéficiant de garanties personnelles, malgré les sanctions que celui-ci pourrait encourir en vertu des règles du cautionnement ou du droit de la responsabilité civile.

Dans son étude, Maître Philippe Hammeau revient sur les raisons qui présidèrent en 2005 à l’instauration d’un privilège de conciliation en faveur des créanciers concourant volontairement au redressement de l’entreprise en difficulté. Tout en examinant les conditions d’acquisition de ce privilège, sa nature et son efficacité, l’éminent praticien interpelle en filigrane sur le caractère réellement incitatif d’une telle mesure.

Enfin, notre collègue Jean-Jacques Ansault nous fait l’honneur d’une réflexion très approfondie sur la rencontre de la cession Dailly à titre de garantie avec le droit des entreprises en difficulté. Cette rencontre, qu’il aborde sous l’angle du cédant failli, découvre l’immunité dont jouit cette cession fiduciaire tant à l’ouverture qu’au cours de la procédure collective. Ce constat, soutenu par la riche analyse de son auteur, doit cependant être mitigé en l’hypothèse d’un conflit opposant le cessionnaire au créancier réservataire, ainsi qu’en présence d’un mandat d’encaissement confié au cédant. Ce nonobstant, Jean-Jacques Ansault démontre l’efficacité de cette discrète et singulière propriété-sûreté que constitue la cession Dailly à titre de garantie.

Au bilan, des diverses réflexions formant ce dossier transparait une appréciation contrastée de l’efficacité des garanties dont jouit le créancier confronté à la procédure collective de son débiteur. Plus largement, ce sont les réformes de 2005 et 2008 qui s’offrent à un bilan nuancé. « 


[1] Cass. com., 27 mars 2012, n° 10.20-077.