Loi Sapin 2 et pouvoirs du HCSF sur l’assurance-vie

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Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dispositions relatives aux pouvoirs du HCSF : commentaires du Professeur Pierre-Grégoire Marly, Banque & Droit janv.-fév. 2017, p. 63.

 

EXTRAIT

 

 » Dans les méandres de ses 169 articles, la loi dite « Sapin 2 » découvre plusieurs dispositions intéressant le secteur des assurances qui est désormais placé sous l’égide du Haut Comité de stabilité financière (HCSF). A la faveur de sa mission macroprudentielle, celui-ci peut ainsi limiter le fonctionnement et moduler la rémunération des contrats d’assurance-vie.

Chargé de la surveillance globale du système financier, le HCSF peut désormais prendre à l’égard de tout ou partie des assureurs et réassureurs diverses mesures conservatoires : limiter l’exercice de certaines opérations, dont les versements, les rachats, les avances et les arbitrages, restreindre la libre disposition des actifs ainsi que la distribution de dividendes ou la rémunération de parts sociales (C. mon. et fin., art. L. 631-2-1, 5° ter). Cette prérogative a pour finalité de prévenir le risque systémique qui résulterait d’une décollecte massive des fonds placés sur les produits d’assurance-vie. S’il ne vise que les organismes français, le nouveau dispositif est toutefois susceptible d’atteindre indirectement les assureurs étrangers qui seraient réassurés par des entreprises locales. Surtout, à la différence de l’ACPR dont le pouvoir de police administrative n’a de portée qu’individuelle, les mesures ici décrites ont une envergure macroprudentielle en ce qu’elles visent l’ensemble ou un ensemble d’organismes potentiellement systémiques.

La mise en œuvre de ces mesures est subordonnée au constat d’une « menace grave et caractérisée pour la situation financière de l’ensemble ou d’un sous-ensemble significatif de ces personnes (i.e. des professionnels visés) ou pour la stabilité du système financier ». En outre, le HCSF ne peut diligenter de mesures que sur proposition du gouverneur de la Banque de France, président de l’ACPR, après avis du collège de supervision de cette autorité. Enfin, la durée de celle-ci est plafonnée à trois mois, renouvelables si leur justification persiste, étant précisé que le contingentement des rachats ne peut excéder six mois consécutifs.

Le nouveau dispositif ne peut donc conduire le HCSF à « bloquer» les contrats d’assurance-vie, mais seulement à en limiter ou retarder le fonctionnement. Du reste, ces restrictions sont temporaires, de quoi le Conseil constitutionnel a pu déduire qu’elles ne méconnaissaient pas la propriété protégée par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789[1].  » (…)

 

[1] Cons. constit., Décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016.

Par Pierre-Grégoire Marly