Applicabilité des sanctions de droit commun au défaut d’information précontractuelle en matière d’assurance vie

A

Note sous Cass. com., 3 juin 2010, Pourvoi n° 09-15-580, Banque & Droit 2010, n° 132, p. 40

RESUME

« A défaut de pouvoir invoquer sa faculté de rétractation, le souscripteur peut néanmoins tenter d’améliorer son sort en recherchant dans le droit commun des obligations la sanction du défaut d’information qu’il impute à l’assureur.

Dans l’espèce rapportée, des époux avaient chacun souscrit un contrat d’assurance vie libellé en unités de compte auquel ils mirent fin en procédant à un rachat total. Constatant la faible valeur de celui-ci au regard des sommes investies, ils assignèrent l’assureur en réparation de leur préjudice financier.

Déboutés de leurs prétentions, ils formèrent un pourvoi dans lequel ils prétendirent que leur assureur avait manqué à son obligation précontractuelle d’information en ne les avertissant du risque de fluctuation des unités de compte que postérieurement à la souscription. En outre, l’assureur aurait omis de leur délivrer une notice d’information conforme aux exigences réglementaires ; or, si cette omission engendre la prorogation du délai de renonciation au contrat, elle constituerait également une faute susceptible d’engager la responsabilité civile de l’assureur.

Le moyen est rejeté par la Cour régulatrice qui approuve les juges du fond d’avoir retenu que l’assureur s’était acquitté de son obligation d’information dés lors que :

–  d’une part, il avait adressé aux preneurs, quelques jours après la souscription, des relevés de compte formulant clairement le risque de variation pouvant affecter la valeur des actifs sous-jacents au contrat ;

– d’autre part, la prudence des preneurs dans le choix des supports de leur contrat signalait leur pleine conscience de ce risque.

A l’analyse, cette décision livre deux enseignements.

Le premier tient à l’applicabilité des sanctions de droit commun au défaut d’information précontractuelle. Un temps, la Cour de cassation avait estimé que la seule sanction de ce manquement résidait dans la prorogation du délai légal de rétractation[1]. A rebours, le présent arrêt confirme implicitement que cette prorogation n’est pas exclusive d’une action en responsabilité civile ou en nullité pour vice du consentement[2].

Le second enseignement concerne l’appréciation du défaut d’information reproché qui, en l’espèce, s’apparentait d’ailleurs à un défaut de mise en garde. A cet égard, il ressort que la seule méconnaissance du formalisme légalement requis ne suffit pas à caractériser la faute de l’assureur dés lors que celui-ci peut délivrer, par d’autres moyens, l’information pertinente[3]. Dit autrement : le fond prime la forme. « 


[1] Cass. 2ème civ., 15 mai 2008, n° 07-11049.

[2] Déjà : Cass. 2ème civ., 8 octobre 2009, FS-P+B, Pourvoi n° 08-18928, Banque et Droit n° 127, nov.-déc. 2009, p. 58, obs. P.-G. Marly. Egalement : Cass 2ème civ., 9 juillet 2009, FS-P+B, Pourvoi n° 08-18730.

[3] En ce sens : Cass 2ème civ., 9 juillet 2009, préc.

Par Pierre-Grégoire Marly